Appropriation culturelle du drapeau LGBT, COVID-19 et Ça va bien aller : réponse à Frédéric Tremblay

Je tiens à répondre ici au billet de blogue de Frédéric Tremblay pour le Journal de Montréal et le Journal de Québec. Je réagis, point par point, à la frustration du blogueur quant à la supposée appropriation culturelle de l’arc-en-ciel, issue du drapeau LGBT, par le mouvement « Ça va bien aller » dans le cadre de la pandémie de la COVID-19.

Drapeau arc-en-ciel LGBT
Drapeau arc-en-ciel LGBT

Dans son billet daté du 10 février dernier sur son blogue du Journal de Montréal et du Journal de Québec, le chroniqueur et médecin Frédéric Tremblay affirme éprouver de l’irritation « […] en lien avec le fait que le drapeau arc-en-ciel était pour moi le symbole des luttes [LGBT] ».

Son irritation proviendrait de l’utilisation de l’arc-en-ciel dans le mouvement « Ça va bien aller » afin d’apporter du bien-être dans la vie des gens durant la pandémie de COVID-19. Eh bien, M. Tremblay n’a pas fini d’être contrarié. La raison est que l’arc-en-ciel incarne un phénomène météorologique naturel qui a acquis diverses significations positives au fil de l’histoire pour plusieurs peuples et communautés. Et il sert de symbole de réconfort durant la pandémie de COVID-19.

L’arc-en-ciel, phénomène d’abord dû à la météo

Un article de Maxisciences rappelle que l’arc-en-ciel « est un phénomène optique dû à la réflexion, la réfraction et la dispersion des radiations colorées composant la lumière du Soleil à travers les gouttes de pluie ». Il « couvre un spectre de couleurs continu qui s’étend du rouge (à l’extérieur) au violet (vers l’intérieur) ».

Arc-en-ciel de Matt Hardy, Pexels.com

Toujours selon le même article, « en fonction des cultures, on considère qu’il présente entre 3 et 9 couleurs. En Occident, on en dénombre généralement sept : rouge, orange, jaune, vert, bleu, indigo et violet. » La beauté de l’arc-en-ciel — dans le spectre de couleurs qu’il montre — doit-elle être exclusive à un groupe?

Appropriation culturelle LGBT de l’arc-en-ciel?

Bien sûr que non. L’arc-en-ciel ne représente pas exclusivement un symbole culturel des LGBT. Pour différentes communautés à travers plusieurs époques, il a toujours incarné un emblème merveilleux d’une grande beauté.

En entrevue avec la chroniqueuse culturelle Eugénie Lépine-Blondeau de l’émission Tout un matin à Radio-Canada Première le 10 avril dernier, l’historien Laurent Turcot rappelle que « dans la mythologie grecque, l’arc-en-ciel est incarné par la déesse Iris qui est une messagère entre le ciel et la terre. » Il ajoute que, « en Irlande, on croyait qu’au bout de l’arc-en-ciel, il y avait un petit leprechaun, une sorte de lutin symbolisant la richesse. Dans la mythologie scandinave, l’arc-en-ciel représente un lien entre ciel et terre. » Bref, l’arc-en-ciel exprime le futur, l’espoir, l’évasion, l’escapade vers un monde meilleur, du moins pour la population occidentale.

Le côté merveilleux de l’arc-en-ciel ne semble pas avoir échappé à Gilbert Beker, le créateur du drapeau officiel LGBT, lequel fut utilisé pour la première lors de la Gay and Lesbian Freedom Day Parade de San Francisco le 25 juin 1978. Beker aurait été soi-disant inspiré par la chanson Over the Rainbow pour la réalisation du drapeau. Cette chanson fut interprétée par l’actrice Judy Garland dans le film The Wizard of Oz, cette dernière devenant une icône gay dans les années 1960 à une époque encore très homophobe. Ceci dit, est-ce que son utilisation par le mouvement « Ça va bien aller », en pleine pandémie de la COVID-19, constitue de l’appropriation culturelle LGBT?

Parade LGBT de Dublin en 2011 avec le drapeau arc-en-ciel

Encore une fois, non. Il est malhonnête de croire qu’il y a une appropriation culturelle de l’arc-en-ciel contre les LGBT parce qu’il serait « un rappel de ce que d’autres avaient dû faire pour que [notre] génération puisse vivre ses amours librement », comme l’affirme M. Tremblay. Nous n’avons pas le monopole culturel de ce symbole, bien qu’il ait inspiré notre émancipation et nos luttes.

Brevet sur le drapeau arc-en-ciel?

Lorsque M. Tremblay affirme que « [s’il voulait] faire procès à ceux qui utilisent l’arc-en-ciel actuellement, [il] ne le [pourrait] pas », il a raison. On ne peut pas breveter les représentations des représentations de phénomènes naturels, contrairement à ce qu’il préconise à la fin de sa chronique. Surtout lorsqu’ils ont été utilisés par d’autres peuples, bien avant les LGBT.

Rappelons que le dépôt d’un brevet sur un produit — de même qu’un composé, un appareil ou un procédé — doit obéir à trois règles :

  • la nouveauté;
  • l’utilité;
  • l’inventivité.

Dans la même veine, des éléments ne peuvent pas être brevetés (article 17.03 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets ou RPBB), l’une d’entre elles étant les motifs imprimés sur un textile. Ainsi, d’autres peuples d’aujourd’hui utilisent un drapeau arc-en-ciel comme les Incas de la ville de Cuzco au Pérou ainsi que les Aymaras de Bolivie qui possèdent leur Wiphala, ce drapeau constitué de 49 carrés colorés.

Drapeau arc-en-ciel de Cuzco au Pérou

Par conséquent, lorsque Frédéric Tremblay prétend que « parler de “propriété collective” […] [est d’éviter] de statuer sur ceux qui peuvent légitimement utiliser quelque chose — et donc en blâmer d’autres légitimement », cela ne tient pas la route. D’autant plus qu’il est pertinent de rappeler que, de son vivant, Gilbert Beker a choisi de ne pas faire breveter sa création puisqu’il souhaitait offrir l’œuvre de sa vie en cadeau pour le monde entier.

De toute manière, ç’aurait été mal vu de faire breveter la représentation d’un phénomène météorologique sur un drapeau. Il faut tenir compte de la charge symbolique de l’arc-en-ciel à travers les âges et les cultures sur l’ensemble de la planète.

Pour conclure, la chronique de Frédéric Tremblay laisse franchement à désirer quant à son argumentation sur « l’appropriation culturelle » de l’arc-en-ciel comme symbole du drapeau LGBT. En somme, il n’a aucune emprise sur la représentation de ce phénomène météorologique qui est utilisé comme symbole de bonheur depuis longtemps par différentes cultures. Il devra accepter que l’arc-en-ciel soit également utilisé par le mouvement « Ça va bien aller » durant la pandémie de la COVID-19.

Défilé de Fierté Montréal: des militants LGBT veulent empêcher François Legault d’y participer

Défilé de Fierté Montréal et militants LGBT queer radicaux

Bienvenue dans le défilé de la Fierté, monsieur Legault

Deux militants LGBT queer radicaux, Alexis Marcoux-Rouleau et Sam Kaizer, veulent faire empêcher le premier ministre du Québec, François Legault, de participer au défilé de Fierté Montréal cette année. Au contraire, je l’invite chaleureusement à y participer. Voici ma réplique à MM. Marcoux-Rouleau et Kaizer.

Anders Turgeon, dossier LGBT

Le 10 août dernier, Le Devoir publiait les propos de MM. Alexis Marcoux-Rouleau et Sam Kaizer sur une initiative invitant le premier ministre du Québec François Legault à se retirer du défilé de Fierté Montréal par le biais de l’initiative communautaire « Let go of Legault! ». Non seulement cette initiative est irresponsable, mais elle suscite également des divisions inutiles entre les personnes LGBT et dans le reste de la population en général.

Pourquoi? Parce que, en dépit du fait que les liens entre le milieu communautaire LGBT et le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) restent à bâtir, M. Legault et ses ministres n’ont pas entravé « les avancées dans la reconnaissance légale des adultes et enfants trans citoyens (projet de loi 103), des personnes trans non binaires et des personnes trans non citoyennes ». De fait, il est factuellement faux de prétendre le contraire comme le prouvent l’intervention du ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec Simon Jolin-Barrette — alors porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de justice — lors du vote concernant le projet de loi 103 le 10 juin 2016. Il en va de même pour les interventions de l’ancienne députée caquiste de Montmorency, Michelyne C. St-Laurent, lors de l’adoption du projet de loi 35 modifiant le Code civil en matière d’état civil, de successions et de publicité des droits le 6 décembre 2013. Ce projet de loi a permis aux personnes trans de pouvoir modifier la mention de son sexe sur son certificat de naissance sans avoir à subir une chirurgie de réassignation sexuelle; Mme C. St-Laurent a consenti à la loi en affirmant qu’il y aurait une meilleure justice pour tous.

Ensuite, quant au fait « qu’il existe des personnes LGBT de toutes les religions, de toutes les ethnicités et de tous les genres », cela n’empêche pas les grandes religions abrahamiques d’être encore intrinsèquement homophobes, transphobes et misogynes. Selon une étude réalisée par l’Institut français d’opinion publique (IFOP) pour le compte de la Fondation Jasmin Roy et la DILCRAH (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT), 63% des musulman.e.s interrogé.e.s considèrent l’homosexualité comme une « maladie » ou une « perversion sexuelle » alors que 20% de catholiques pratiquants partagent cette position. Même si l’ouverture des personnes religieuses aux LGBT est en hausse, il reste que les religions condamnent encore massivement l’homosexualité et les réalités trans.

Enfin, il est tout à fait exagéré de dénoncer l’appui de M. Legault au livre L’empire du politiquement correct de Mathieu Bock-Côté. MM. Marcoux-Rouleau et Kaizer prétendent que « le livre en question qualifie le mouvement pour les droits des personnes trans de “loufoque“ » et qu’il voit « les groupes minoritaires comme des menaces ». À défaut d’avoir lu son plus récent ouvrage, j’hésite à affirmer que M. Bock-Côté manque de respect envers les personnes trans, mais en revanche il dénonce fermement l’étendue d’un courant appelant à la déconstruction des genres à l’ensemble de la société. N’est-ce pas le propre des personnes conservatrices comme M. Bock-Côté de tempérer le progressisme en appelant à la prudence? C’est le type de nuance qu’il convient d’effectuer pour ainsi éviter les paraboles catastrophistes et victimaires de MM. Marcoux-Rouleau et Kaizer.

En somme, l’appel de MM. Marcoux-Rouleau et Kaizer à empêcher M. Legault de participer au défilé de Fierté Montréal dimanche relève d’une tentative malheureuse pour diviser les personnes LGBT entre elles et avec le reste de la société. Je souhaite ainsi la bienvenue au premier ministre du Québec et à la CAQ dans les rangs du défilé dimanche prochain.

p.s.: Vous pouvez trouver également mon article sur le site Discernement.net ici.

Manifeste: Avoir le droit d’être en tant que LGBT

Manifeste

Le droit de pouvoir exister en tant que personne LGBT

En cette Journée internationale du coming-out, je veux vous présenter un texte que j’ai écrit dans le cadre de mon cours Rédaction et communications publiques à l’Université de Montréal. L’exercice étant la rédaction d’un manifeste, j’ai choisi d’un rédiger un à propos du droit d’exister et d’être en tant que gai, lesbienne, bisexuel ou trans (LGBT) et contre l’homophobie.

Anders Turgeon Dossiers Homosexualité, Homophobie, LGBT

Rainbow flag. Symbol of gay pride.

Rainbow flag. Symbol of gay pride. (Photo credit: Wikipedia)

Être gai, lesbienne, bisexuel(le) et/ou trans est encore mal vu dans notre monde aujourd’hui malgré le travail colossal accompli par les militants des diverses communauté lesbienne, gaie, bisexuelle et trans (LGBT). La lutte reste encore à être menée en Occident contre l’homophobie insidieuse et dans le reste du monde contre l’homophobie d’État.

Que ce soit en Europe ou en Amérique du Nord, nous devons sans cesse lutter contre l’homophobie et l’intimidation, son pendant naturel. N’oublions pas que l’intimidation touche beaucoup les jeunes gais et lesbiennes en milieu scolaire. Près de 600 jeunes LGBT de 10 à 24 ans se suicident à chaque année selon Statistique Canada. Chaque suicide en est un de trop. Tout comme les remarques désobligeantes traitant de notre manière de nous présenter, de vivre, d’aimer et d’élever nos enfants.

Il ne faut pas oublier non plus nos confrères et consœurs LGBT en Afrique, au Moyen-Orient ou en Asie centrale qui n’ont

pas le droit d’aimer des gens du même sexe qu’eux. Ils sont insultés, humiliés, bâillonnés, emprisonnés et même condamnés à mort juste pour leur amour envers leur propre sexe. Pire, ce sont les gouvernements de ces États qui leur dénient le droit d’exister en pratiquant une homophobie d’État. Il ne faut pas oublier non plus les LGBT d’Amérique latine et de l’Europe de l’est qui ne peuvent pas s’afficher ouvertement comme étant des LGBT sur la place publique et ainsi faire connaître leur réalité.

Il est temps que nous, LGBT, fassions valoir notre droit d’exister et de vivre sans risquer de subir de la haine homophobe de toute nature. Il est temps que nous poursuivions le combat pour les autres LGBT de la planète qui ne peuvent pas être qui ils sont ou juste d’aimer des gens comme eux. Après tout, nous sommes tous des êtres humains.

Un récit sur un héros gai et violent

Un récit narratif homosexuel et violent

Tuer Larry ou la violente revanche des gais

Je vous propose ici un récit narratif rédigé dans le cadre d’un de mes cours à l’Université de Montréal. C’est un fantasme d’écriture que je caressais depuis quelques semaines. Voilà ainsi ma première histoire mettant en vedette un héros gai, ninja et assassin d’homophobes en prime. Bonne lecture!

Appuyés contre le cadre de porte de sa chambre, ses enfants Rose et Stephen le regardaient préparer sa valise. Jack Jinx, un assassin professionnel « pigiste » menant des missions périlleuses pour des LGBT — missions qui risquaient toujours de lui coûter la vie –, se préparait pour l’épreuve la plus dangereuse de sa carrière. Il devait libérer Johnny Cocker, son conjoint et deuxième père de ses enfants, des mains du terrible Larry Strait, un pasteur évangélique très homophobe. Ce dernier gardait Johnny emprisonné dans le donjon de sa riche demeure et voulait le tuer. Après avoir fini de préparer ses bagages, Jack alla reconduire ses enfants chez sa sœur Lana puis se rendit à l’aéroport de Los Angeles. Il prenait un avion pour San Antonio, au Texas, prêt à affronter et à éliminer le terrible Larry Strait.

ninja-gai-tuer-larry-revanche-lgbt-homosexuelsRevenons en arrière. Jack Jinx, ce grand homme de 30 ans  ̶  blond, yeux bleus, un physique sculpté  ̶  évoluait dans la violence depuis l’âge de sept ans, et ce, à la suite de l’assassinat de ses parents par un baron de la drogue mexicain. Ayant vengé la mort de ses parents en empalant ce baron sur un katana bien aiguisé, il suivit par la suite un entraînement cruel et inhumain composé de diverses formes d’arts martiaux chinois et japonais (karaté, ninjutsu et ju-jitsu), de gymnastique, d’espionnage, de natation et de combats militaires durant l’adolescence. À 18 ans, il devint un guerrier hors pair doté d’un physique d’athlète olympique et l’un des tueurs les plus redoutables au monde. Devenu un ninja, il maniait avec expertise diverses armes blanches japonaises ̶ des saïs, des katanas, des étoiles shuriken et des couteaux kyoketsu shoge ̶ ainsi que divers poignards et des revolvers. À 20 ans, il devint un assassin professionnel « pigiste » pour le compte de particuliers et d’associations LGBT à travers le monde : il liquidait leurs opposants homophobes particulièrement violents au cours de missions périlleuses desquelles il sortait presque toujours sans blessures importantes.

Pourtant, malgré son « travail » et son quotidien marqués par la violence depuis l’enfance, Jack rêvait de douceur et de stabilité auprès d’un homme qui pouvait l’aimer pour qui il était et qu’il pouvait aimer en retour. Son vœu s’exauça lorsque, à 25 ans, il rencontra Johnny Cocker. Ce dernier était un séduisant informaticien de 32 ans au physique délicat et bien proportionné aux cheveux bruns et aux yeux verts. Travaillant pour une école secondaire de Pasadena, en Californie, il chérissait un mode de vie simple axé sur le bonheur, l’honnêteté, la stabilité et la famille. Jack et Johnny tombèrent amoureux l’un de l’autre. Un an après leur rencontre, ils se marièrent et adoptèrent deux enfants sénégalais, un garçon et une fille prénommés respectivement Stephen et Rose. Tout ce beau monde vivait dans la quiétude malgré les risques associés au métier violent et dangereux de Jack.

La quiétude de la famille de Johnny et Jack vola en éclats lorsque la plus récente mission de ce dernier échoua. En effet, de l’association Gaysninja-gai-tuer-larry-revanche-lgbt-homosexuels-2 For Freedom, un lobby gai très puissant aux États-Unis, il reçut le mandat d’occire Larry Strait, un riche pasteur évangélique de 54 ans, petit et chauve, dont la profonde haine des LGBT puisait dans sa foi conservatrice et son fondamentalisme religieux. Il avait fondé No Rainbows, une Église très homophobe et puissante au Texas. Elle avait froidement fait assassiner deux des membres les plus influents de Gays For Freedom. Débusqué par des espions à la solde de l’Église  pendant sa mission, Jack parvint à s’enfuir avant d’être capturé par les sbires du pasteur Larry. Ayant été informé de la mission ratée de l’assassin gai Jack, ce dernier jura de lui faire payer, à Jack et sa famille (dont il apprit l’existence en même temps), cette tentative d’assassinat avortée contre sa personne. Par conséquent, il chargea ses informateurs personnels de dénicher le lieu où habitait le ninja tueur, ce qui s’avéra une tâche aisée. Il dépêcha six de ses douze mercenaires à Los Angeles dans le but de nuire à la famille de Jack Jinx. Parvenus à sa maison, les mercenaires décidèrent d’y entrer tout bonnement en sonnant à la porte.

Johnny était seul à la maison puisqu’il y travaillait cette journée-là. Jack magasinait et les enfants étaient à l’école. Depuis la mission ratée, Johnny pensait à tort que le pasteur Larry Strait ne chercherait pas à se venger de Jack et croyait leur famille en sécurité. Il avait commis une erreur de jugement grave puisque, seul à la maison, il avait ouvert nonchalamment la porte aux mercenaires du pasteur qui le kidnappèrent illico presto. Pendant ce temps, Jack terminait son magasinage lorsqu’il reçut un courriel intrigant sur son iPhone. Il y découvrit un message qui lui glaça le sang : « Bonjour petite pédale tueuse. Au moment où je t’écris, mes hommes ont enlevé ton copain et me l’emmènent. C’est la conséquence pour avoir tenté de me tuer. Dieu m’a recommandé que tu te rendes à moi avec ton pédé de copain. Si tu ne t’exécutes pas, je lui fais sauter la cervelle et il ira en Enfer. Tout comme toi. Je t’attends avec impatience. À bientôt ! » Il n’en fallut pas plus pour mettre Jack hors de lui, se maudissant au passage pour ne pas avoir mieux assuré la protection de sa famille depuis sa tentative de meurtre raté contre ce Larry Strait. Il retourna chez lui en allant chercher ses enfants à l’école. Déterminé à liquider ce sale homophobe afin de libérer son Johnny, il saurait mettre un terme au régime de terreur de son Église à l’endroit des LGBT à travers les États-Unis.

Le lendemain, fraîchement débarqué de Los Angeles à San Antonio, au Texas, Jack Jinx réserva la chambre 507 (son nombre fétiche, lui qui est très superstitieux) à l’hôtel Best Western du centre-ville. Il ne désirait qu’une chambre modeste pourvue du strict minimum : un lit double pourvu d’un matelas confortable, un bureau de travail sur lequel déposer son katana et ses saïs, un téléphone et une salle de bains. Il séjournait dans un grand hôtel au lieu d’un motel, et ce, afin d’éviter d’attirer les regards des sbires de Larry Strait et des membres de son Église.

ninja-gai-tuer-larry-revanche-lgbt-homosexuels-3Aussitôt arrivé à sa chambre, Jack songea à la manière de s’introduire chez le pasteur pour le tuer et délivrer son amoureux Johnny, mais il se butait à un obstacle majeur. Il devait réussir à contourner les pièges tendus par Larry Strait; il avait échoué sa dernière mission contre lui en raison de son manque de précautions. Cette fois, il devait recevoir de l’aide pour mener sa quête à terme. Il pensa à Barbie Butcher, une femme noire lesbienne de 30 ans et ex-soldate devenue tueuse à gages. Elle possédait un physique très imposant et une personnalité intrépide, en plus de se vêtir comme un homme. Experte dans les techniques d’auto-défense et dans le maniement des armes à feu, elle pouvait flanquer une raclée à n’importe quel homme costaud et armé. Après un bref échange au téléphone, Jack et Barbie se donnèrent rendez-vous dans sa chambre d’hôtel. La tueuse manifesta son désir de participer à la mission de l’assassin après que celui-ci lui eut exposé son histoire. Ensemble, ils échafaudèrent un plan pour parvenir à pénétrer le domaine du pasteur : forcer la grille du domaine, éliminer ses mercenaires et quiconque se trouvant sur leur chemin et, par la suite, Jack irait tuer Larry et délivrer son Johnny. Ils prévirent exécuter ce plan la journée suivante lorsqu’ils allaient se rejoindre à leur lieu de rencontre situé près de la grille donnant accès au domaine du pasteur Larry.

Le jour d’après, Barbie et Jack se retrouvèrent à l’endroit prévu, soit un garage situé à quelques pâtés de maison du domicile de Larry. L’ex-soldate avait emmené quelques unes de ses anciennes consœurs de l’armée en guise d’aide supplémentaire. L’opération se déroula comme il fut prévu : Jack, Barbie et ses copines ex-militaires firent sauter la grille et affrontèrent les mercenaires de Larry postés sur le terrain du domaine; la tueuse et ses copines utilisèrent leurs poings et leur arsenal d’armes à feu, tandis que Jack se servit de ses talents de ninja ainsi que de son revolver et de ses saïs pour se débarrasser de ces encombrants mercenaires l’empêchant d’accéder à Larry Strait.

ninja-gai-tuer-larry-revanche-lgbt-homosexuels-4Pendant que les combats entre Barbie et ses congénères ainsi que les mercenaires se poursuivirent, le tueur gai s’introduisit dans la luxueuse maison du pasteur, grâce à ses étoiles shuriken qu’il lança dans la vitre de la porte-patio de sa large terrasse pour la briser en mille morceaux. Malgré le déclenchement du système d’alarme, Jack parcourut la vaste demeure pour trouver Larry Strait au plus vite. Il le trouva dans son immense donjon, alors qu’il s’apprêtait à torturer le pauvre Johnny. Ce dernier était  attaché contre une chaise avec des fils barbelés et était incapable de parler à cause d’une boule placée sur sa bouche et maintenu par des sangles.

–          Je t’attendais, petite pédale tueuse. Je m’apprêtais à tuer ton copain pour ensuite t’éliminer à ton tour. Je dois expier vos péchés de sodomite à tous les deux, lança Larry.

–          Sale fils de pute! Je vais vous liquider avant que vous touchiez à mon chéri, hurla Jack.

Sur ces mots, il projeta ses deux saïs en direction du pasteur. Toutefois, il ne savait pas que Larry maîtrisait parfaitement les techniques du ninjutsu. Il vit le pasteur esquiver ses saïs qui se fracassèrent contre le mur de pierres du donjon. Aussi dégaina-t-il son katana, prêt à affronter le pasteur dans un duel sans merci.

–          Si tu veux jouer au samouraï, accepte de mourir comme un samouraï, sale pédé, se moqua Larry.

–          Je vais vous tuer et dissoudre votre Église de merde, rétorqua Jack.

Armés de leurs katanas respectifs, le pasteur et l’assassin se livrèrent à un duel impitoyable durant lequel ils s’infligèrent des blessures sérieuses. Faisant fi de la douleur et du sang s’échappant de leurs plaies, les protagonistes continuèrent le combat jusqu’à ce que, dans un ultime mouvement de katana, Jack réussisse à couper à tête de Larry. Après s’être délecté de sa victoire, Jack s’empressa de libérer Johnny en défaisant ses liens.

–          Mon chéri! Je suis si content de te retrouver! Excuse-moi, éructa Johnny entre deux sanglots de joie.

–          C’est à moi de m’excuser auprès de toi pour avoir failli à ta sécurité et à celle des enfants en raison de mon métier dangereux, le rassura Jack.

ninja-gai-tuer-larry-revanche-lgbt-homosexuels-5Après ces retrouvailles émouvantes, les amoureux partirent retrouver Barbie et ses amies qui avaient massacré la petite armée personnelle du pasteur et des membres de l’Église venus prêter main forte à cette dernière. Ils retournèrent tous ensemble en Californie, non sans avoir tous reçu des soins médicaux.

Finalement, une semaine après la mort du pasteur Larry Strait, l’Église évangélique No Rainbows implosa à cause d’une querelle surmédiatisée entre ses membres pour savoir qui allait succéder au défunt pasteur. Devant cela, tous les LGBT à travers les États-Unis poussèrent un soupir de soulagement, affirmant que les crimes homophobes de cette organisation à leur encontre appartenaient désormais au passé. Du côté de Johnny et Jack, ce dernier cessa son métier d’assassin professionnel, déménagea sa famille en Alaska en procurant, à chacun de ses membres, une nouvelle identité. Ainsi se termina la vie violente de Jack Jinx. Il allait enfin goûter à une existence paisible en tant qu’époux et père d’une famille homoparentale, comme il le souhaitait.

Un homosexuel peut-il immigrer au Canada?

Homosexualité et immigration

Fuir son pays pour mieux vivre son orientation sexuelle

Dans le documentaire « Une dernière chance », nous suivons Zaki Sayid, un homme gai d’origine égyptienne, dans son quotidien à Montréal. À l’image des quatre autres protagonistes du documentaire, il a fui son pays d’origine puisqu’il y était persécuté en raison de son orientation sexuelle.

Anders Turgeon

derniere-chance-documentaire-paul-emile-homosexualite-immigration-orientation-sexuelle-immigrant-homosexuel-homophobieZaki Sayid est un jeune homme gai originaire d’Égypte dont l’existence se déroule maintenant à Montréal. Son récit débute dans les prisons égyptiennes, où il a été incarcéré en raison de son orientation sexuelle, pour se terminer au Canada. En 2002, par souci de faire respecter les « bonnes mœurs », le gouvernement égyptien se lance dans une campagne de répression contre les homosexuels. Zaki fait partie des victimes de cette répression.

Arrêté pour « débauche »

À la faveur d’une séance de clavardage sur un site web pour gais, Zaki obtient un rendez-vous avec un inconnu au Caire, la capitale égyptienne. Mais cet inconnu étant un policier, il se fait arrêter sur place. Après un interrogatoire dans un ascenseur, il subit un procès de cinq minutes au cours duquel il est condamné à 3 ans de prison et 3 ans de liberté surveillée.

Aussitôt sa condamnation annoncée, il est incarcéré dans un pénitencier surpeuplé. « J’ai été amené dans une prison où nous étions 250 personnes entassées dans un local grand comme une salle de classe. Nous devions dormir recroquevillés sur nous-mêmes et j’étais la cible d’insultes homophobes », relate-t-il.

Ayant été torturé lors de sa détention, Zaki préfère ne pas élaborer là-dessus. Ni même sur les exécutions matinales de condamnés à mort ayant lieu à côté de sa cellule. Mais sa gorge se noue et des larmes coulent le long de ses joues lorsqu’il évoque le moment où sa famille a tenté d’entrer en contact avec lui. « Je ne pouvais pas parler à ma famille et elle ne pouvait pas me rejoindre. C’était horrible », se rappelle-t-il entre deux sanglots.

Libéré grâce à l’intervention d’Amnistie Internationale

Pendant que Zaki est emprisonné, ses amis parlent de son cas à Amnistie Internationale. Avec son réseau consacré à la protection des droits des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transsexuelles (LGBT), l’organisation travaillait déjà à la libération des homosexuels égyptiens avec le concours de Human Rights Watch.

Une campagne est aussitôt lancée et prend la forme de l’envoi de lettres de soutien, écrites par les militants d’Amnistie, pour les prisonniers égyptiens. La campagne inclut également l’envoi de lettres, pré-écrites par Amnistie Internationale, à l’endroit du président de l’Égypte Hosni Moubarak.

Selon Zaki, cette campagne contribue à le faire libérer. « Aux trois quarts de ma sentence, les autorités carcérales m’ont dit que je pouvais sortir à cause de ma bonne conduite. Mais je sais très bien que c’est plutôt à la suite des pressions internationales », plaide-t-il. Il bénéficie ensuite d’une semi-liberté durant laquelle il passe ses nuits dans un poste de police du Caire.

L’exil au Canada

Totalement libéré en janvier 2006, il ne se sent pourtant pas à l’aise de retourner dans sa région natale en Égypte. Son homosexualité ayant été révélée dans la foulée de la campagne d’Amnistie Internationale, sa famille insiste néanmoins pour qu’il mène une vie hétérosexuelle. « Lorsque je téléphone en Égypte, mes parents mettent continuellement de la pression sur moi pour que je trouve une femme avec qui me marier et fonder une famille », constate-t-il.

Zaki prend ainsi la décision d’émigrer au Canada en 2006 afin de bien vivre son homosexualité sans être inquiété par les autorités. Il aboutit à Montréal où il réside depuis ce temps. À la suite de ses démarches auprès de l’immigration, il obtient son statut de réfugié en 2007 sur les bases de l’histoire de son incarcération. Il fait ensuite des études à l’université Concordia où il obtient un baccalauréat en informatique.

Même s’il est en mesure de vivre librement son homosexualité au Canada, il s’ennuie quelquefois de son Égypte natal. Puisqu’il a immigré seul dans sa nouvelle patrie, il ne peut compter sur la présence immédiate de membres de sa famille. « Je m’ennuie de mes parents et de mes autres proches. Même si j’ai toujours peur de me faire rejeter par ceux-ci parce que je suis gai », confesse-t-il.

Les ressources LGBT montréalaises pour Zaki ne manquent pas. Il est impliqué dans Helem, une organisation pour gais et lesbiennes du Liban, qui aide également les homosexuels d’autres pays du Moyen-Orient dont l’Égypte. Il est ainsi en mesure de se créer une deuxième famille au sein de cet organisme.

Le documentaire « Une dernière chance »

Outre l’histoire de Zaki, le documentaire « Une dernière chance » suit quatre autres immigrants LGBT dans leur quête pour immigrer audocumentaire-une-derniere-chance-homosexualite-immigration-orientation-sexuelle-immigrant-homosexuel-homophobie Canada. Persécutés dans leur pays d’origine en raison de leur orientation sexuelle ou de leur changement d’identité sexuelle, ils espèrent trouver générosité et soutien dans leur nouvelle patrie.

À travers le suivi du quotidien des cinq demandeurs d’asile, des avocats et des associations communautaires LGBT témoignent en leur faveur. Ils se mobilisent également pour leur venir en aide. Parmi ces avocats et ces associations, il est possible de retrouver Noël St-Pierre, avocat spécialisé dans les causes relevant de l’immigration et des minorités sexuelles.

Produit par l’Office national du film du Canada (ONF), « Une dernière chance » est signé par le cinéaste acadien Paul-Émile d’Entremont. Ce dernier se spécialise dans les documentaires sur la quête identitaire et l’émancipation des individus.

Voir l’article publié, à l’origine, sur le blog de Raymond Viger.